Papa, papa ! La petite voix poussa des cris d’alarme, perçant les hurlements des deux parents. Il tourna la tête vers la fillette. Une cascade de larmes coulait à flots de ses yeux ronds. Le visage emprisonné derrière les barreaux de la rambarde d’escalier. Les menottes au bout de son petit corps convulsé, tentèrent désespérément de les arracher. La maman profita du SOS lancé par sa fille. Elle sauta au coup du papa, toutes griffes dehors. L’attaque fut rapide et vicieuse. Des trainées de sang apparurent sur la joue de sa victime. S’en était trop. A force de coup de poing, de claques, de griffures et d’insultes nauséabondes, il saisit ses épaules en tenaille et la secoua comme un pommier. Elle se débâtit comme un animal piégé. Lui cracha un jet de salive gluant en plein visage. Ecœuré, il la projeta avec haine sur le canapé. Elle y rebondit pour finir sa cascade en claquant son genou sur le carrelage froid. Inerte un instant, il n’eut pas le temps de s’inquiéter. Le pitbull revint à la charge, talon relevé sur la pointe des orteils « Ah oui tu veux me frapper c’est ça ? Vas-y ! Et ta gosse tu ne seras pas près de la revoir ! ». L’adolescente de 15 ans, mains sur les joues tenta par des plaintes hystériques de calmer la furie. « Maman ! Arrête ! Arrête ». Son beau-père vit rouge, las de cette scène. Las de toutes ces mêmes scènes. Las de toutes ses injures et ses menaces. Il envoya une énorme gifle à la vipère. Chancelante elle ravala son venin. « Maintenant dégage avec tes gosses ». Il l’attrapa par les cheveux en direction de la fenêtre, hors de lui, il en oublia les deux spectatrices, trop jeunes, pour assister au film qui se jouait devant elles. La bête se libéra de son emprise. « ok, ok, on se casse, tu l’auras voulu ! ». Elle grimpât l’escalier. Le regard vicieux, le sourire acéré elle se pencha sur le témoin en sanglot et lui dit d’une voix sournoise et calme « Tu vois Lola. Ton père nous vire comme des merdes »
Ce premier samedi en solitaire, il s’imbibait de bière. ». Ses pupilles baignaient dans un bain de larmes. Il se noyait dans le refrain du chanteur bobo-alcolo, plongeant dans un océan de plaisir douloureux. « Lola, J’suis qu’un fantôme quand tu vas où j’suis pas. Tu sais ma môme que j’suis Morgane de toi ». Son monde était englouti, submergé par le désespoir. Sa chair, son sang. Vidé et seul. Sans nouvelles de sa fille. L’abattement fit place à l’angoisse. C’est un cas social, une mauvaise mère, j’ai sorti sa fille de la DAASS. Mais j’ai levé la main sur elle. Puis mes addictions…A-t-elle porté plainte ou était-ce une menace en l’air ?

– Non pas de plaintes, Monsieur Barabet. Pas à ce jour. Et je ne lirais pas ceci. La voix tremblante, son client continua. – Maitre, j’ai tout retranscrit ici. Les disputes, ses chantages, ses violences. Ils ne peuvent pas lui laisser ! Le coup de ciseaux, ses perversités, ses scènes hystériques… – Le juge vous répondra qu’il ne fallait vous séparer. Monsieur Barabet. Je crois savoir que vous n’êtes pas blanc comme neige. Et vous me questionnez au sujet d’une plainte. L’avez-vous frappé ? – Ca va, je bois à l’apéro et je viens même d’arrêter la fumette avec cette histoire. Un mal pour un bien… Ce fameux jour, j’ai craqué. Je l’ai jeté sur le canapé. Je crois qu’elle s’est faite mal au genou en tombant. Je lui ai mis une gifle aussi. Une grosse. – Voilà…Seul compte Lola et il faut rester sur cet axe de défense. Son équilibre. – Oui justement. Dans ce domaine la parité n’existe pas ! Que 12% des pères obtiennent la garde de leurs gosses ! – Je ne peux pas remettre en cause les chiffres. Soyez confiant. Les yeux mouillés il se lamenta – Elle la retient depuis une semaine…
Il comprit rapidement qu’elle était plus encline à lui laisser voir Lola si elle entrevoyait une réconciliation possible. Se mit alors en place un marché insidieux, aux intérêts divergents. Du sexe comme monnaie déchange contre du temps passé avec son enfant. Elle s’imaginait encore pouvoir l’enchainer grâce à ses prouesses sexuelles. Lui, libérez de son joug il en tira profit. Alors il lui laissa le croire. Coucher pour voir sa fille n’était pas si désagréable et c’était la seule solution dans l’attente du jugement. Elle en attendait plus mais il ne pouvait lui offrir. Il avait le besoin vital
Nouvelle Bradbury : Elle n’avait rien demandé.


d’oublier ces folles années de torture. Elle sut qu’il cherchait du réconfort ailleurs, il reçut un SMS lapidaire et destructeur. « Tu peux dire au revoir à ta fille !!!! ». En bas de l’immeuble gris, il ne cessait de faire sonner le téléphone de la ravisseuse. Il l’observa à travers le carreau sale du clapier où était retenu l’otage, il la vit tendre sa main devant elle. Au même instant son appel bascula sur messagerie. Il cria son désespoir. Fustigea gorge déployée la femme enleveuse d’enfant. Il menaça de lui faire vivre ses jours les plus sombres. Les rideaux commençaient à s’agiter aux fenêtres voisines. Les gens habitués au tapage des galériens, s’étonnaient des cris inhabituels et déchirants.
La nuit fut agitée. Sevré mais pas sobre, il se vengea sur la Heineken toute la soirée. La boule au ventre au coucher. Il remplit son cœur de rancœur et de haine au réveil. Il devait agir. Peu lui importait les conséquences de ces actes. Peu importait les gens qu’il allait impliqués. Seul, récupérer sa princesse comptait à ses yeux. Il prit son téléphone. « C’est ta sœur raisonne là. Si je n’ai pas Lola à 13H je balance à ton taff que tu pique dans la réserve » Sans suivis un déluge de plaintes, d’insultes et d’intimidations en tout genre. A 13h l’enfant était chez lui.
Il prit le rôle du ravisseur. L’agréable séquestration ne dura pas longtemps. La maman éplorée le supplia de lui amener. « Juste cinq minutes sur le parking de l’école ». Il gara sa voiture et détacha l’otage du siège bébé pour le remettre à sa mère. Pas rassuré, il couinait, le regard vers son Papa. Tout d’un coup, il vit dans son dos un enfant courant à toute vitesse. « Va chercher Safia », cria la femme. Il comprit le subterfuge. Sa grande sœur était le seul appât auquel la benjamine pourrait mordre. Mais il ne laissa pas le piège se refermer. Il se jeta sur la mère perfide et tenta de lui arracher la petite des bras. Elle résista. Ce n’était pas une tigresse protectrice mais une hyène voleuse. Une bataille se jouait où l’enfeu était une pauvre innocente de 3 ans. Terrorisée par l’idée de la perdre à nouveau, il balaya d’un coup de pied son adversaire. Le coup fut imparable. La mère s’écroula, fillette en pleur sur la poitrine. Il s’en saisit comme un ballon de rugby. Il contourna le véhicule et jeta la traumatisée dans son Isofix. Il revint sur ses pas pour s’installer au volant. L’enragée s’y cramponnait déjà, vociférant ses sempiternelles attaques. Il la tira à lui par la manche. Il essaya de desserrer ses pinces aux ongles manucurés. Il arracha son épaisse tignasse décolorée. Peine perdue ! Il abdiqua. Refit les mêmes gestes qu’en arrivant mais deux fois plus vite. Sa fille contre lui, il s’enfuit, abandonnant la BM.
A la gendarmerie il était encore en sueur de sa longue marche. L’accueil fut glacial. Sa pseudo victime était réfugiée derrière le comptoir, abritée par une gendarme. Il a l’habitude, c’est toujours l’homme le méchant dans ces situations. Il regarda l’autre femme en uniforme. Il l’a reconnu. Elle avait déjà débarqué chez lui lors d’une énième dispute. Il sut que ces chances de repartir avec la petite étaient minces. Il avait en face de lui trois adversaires menaçantes. Des mamans peut-être. A force de reproches, de pleurs, de cries, de comédies. Celle qui protégeait la comédienne pris la parole. « Sans décision de justice je ne peux rien ». Alors pour conclure cette mauvaise pièce de théâtre, elle échangea avec la petite victime oubliée des parents : « Lola avec qui veux-tu aller : Papa

Mathieu Tourrette

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Sandra

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