Il fit couler son café. A la fenêtre il contempla l’aurore boréale et se pencha sur son téléphone. L’écran qui apparu lui fit penser au drap blanc qui recouvrait son jardin. Une signature rouge se dessina. R, E, V…
Cette ritournelle musicale me tape sur les nerfs ! Un air joyeux. Une mélodie agaçante qui rentre dans votre tête et n’en sors plus ! Sarabande de trompettes, de flûtes et de xylophones ! Et ce roulement de tambour…Ce petit cris de piaf cocasse. La voix grave façon Hollywood ! On dirait le générique d’un film où le Pirates des caraïbes serait un ménestrel ! Mon poussin ronfle à côté de la baguette de sourcier, rompu à cette berceuse énergique. S’il n’y avait qu’elle ! Je suis suspendu à cette carte ! Chanceux, je ne suis pas emprisonné. Je pourrai presque m’échapper. Franchir le ravin. Partir en montagne. Survoler les cascades. Non ! Moi je dois éclater du goret ! Je ne suis pas le seul ? Certes, mais si je ne suis pas là pour ouvrir le bal, les clapiers restent clos. Je voltige, je virevolte, je rebondis, je dégringole, je me fais des bosses ! C’est la rançon de la gloire, je suis la star. Laisser le perchoir à un autre membre du clan ? Vaines chimères, mon image colle à la marque ! Un cadeau empoisonné oui ! Je ne peux m’abaisser à cela. Même à cette espèce de vautour de Terry ! Bien que rouge, il n’a pas la silhouette d’un pinson. Je suis las de cette musique, las de prendre des coups, las d’être privé de sourire. Pour couronner le tout, le maitre de cérémonie est un débutant. Soixante-dix perles, dix diam ’s et une pauvre étoile. Il va falloir fuser deux fois plus vite.
Dans la nuit grise enneigée, les points jaunes aux fenêtres des habitations se confondent avec les étoiles. Son rendez-vous de 15h est annulé. Un brouhaha sourd remplis le wagon. Une voix se fraye un chemin jusqu’à ses oreilles. Il relève la tête vers le paysage recouvert d’un tapis neigeux. Dans le reflet du miroir immaculé, il admire la belle Loviisa. Elle se sent happée par une douce sensation. Elle tourne son visage au trait fins vers la constellation de lumières. Ses yeux glissent vers l’amoureux transit. Pincée au cœur. Elle esquisse un plissement de lèvre affectueux. Lui, timide, laisse son regard se dérober sur l’écran de son téléphone.
J’ai envie de piailler ! Encagé moi par pitié ! Peine perdue. C’est encore bibi qui s’y colle. Lancé dans les airs comme un vulgaire caillou. Un drop tiré haut dans les nuages. Mes yeux perçants plongent en contrebas, dans la rivière où se jettent les cascades. Vue d’ici, l’animal crasseux, ressemble à un petit pois. Je fuse. Je tournoie. Je rate le premier étage. Vais-je m’empaler dans le nez de la fusée ? Même pas ! J’ai rarement été si nul. Beurk ! Je tombe dans une fleur qui me recrache comme un glaviot ! Stop ! Je craque ! A quoi bon cette course ridicule ? Récupérer des œufs ? Mon croupion oui ! Tout juste une douzaine ! Ils abandonnent toujours avant. Sauf ceux qui payent ! Une vraie machine à cash ! Ils passent les tableaux sans attente et nous affublent de chapeaux ridicules. Libérez les autres ? Sly et ses loopings ridicules m’agace. Le Givré ? Une belle triplette de bécasses ! Heureusement, mon meilleur ami est à mes côtés. Chucky. Fait dans un trapèze le pauvre. Il faut dire qu’il est issu d’une longue lignée de bucherons. Et ma poulette l’explosive…Nous rêvons d’emprunter le chemin de la montagne. Nous sommes contraints de suivre celui des collines. Mathilde. D’ailleurs où est-elle ? Zut ! Une éclipse de bigo.
– Je suis à la bibliothèque. Ce vendredi ? Pourquoi pas. Kimi à l‘autre bout du fil lui explique le programme de la soirée à venir. Dans l’allée principale, un ange passe emportant son regard. Le téléphone collé à l’oreille, la voix de son ami n’est plus qu’un murmure lointain. Son cœur suit le chemin de la grande blonde. La beauté scandinave dans toute sa splendeur. Elle marche droit devant elle, la tête haute, protégeant ses livres contre sa généreuse poitrine. Elle est de nouveau saisie par ce curieux sentiment. Tendrement observée, elle tourne la tête en direction du jeune geek. Ses yeux de la couleur de la Baltique plongent dans ceux du beau Linus. Elle s’arrête le temps d’une micro
seconde. Elle n’ose pas le déranger. Elle lui envoie son plus beau sourire accompagné d’un geste de la main amical, amoureux peut-être. Pris au dépourvu, il n’a pas le temps de réagir. Kimi pourrait presque entendre les battements de son cœur à transportées à travers les ondes. – Hey oh ! Je réserve la soirée ? – Oui, oui pardon. Je te laisse. Il raccroche. Regarde avec regrets s’éloigner la longue chevelure dorée. Tête baissée, il observe le livre posé sur la table devant lui. Hésite à s’en saisir. Il hoche la tête pour se dire non à lui-même puis replonge dans son Nokia.
En panique, je m’égosille. « – Chucky, Chucky ! Mathilde a disparue ! Regarde. Sa carte est vide. – C’est impossible ! Ce n’est pas dans le code ! – Moi je sais où elle est ! Je ne te le dirais pas tête de piaf ! En entendant ce chant nasillard, son rival le toisa. – Toi tu me débecte ! Qui me dit que ce n’est pas toi qui as fait le coup, gras du jabot ? – Non ! Jamais je ne lui ferai de mal. Promet de me libérer en premier et je te révélerai où elle est cachée. – Arrêtez de vous prendre le bec ! Rouge, fais lui confiance. Oubli ses erreurs du passé. Le chef du clan réfléchis un instant. – Ok Terry ! Cui-cui d’honneur ! – Le dev l’a installé derrière la carte mystère… »
Bec et ongles, je pars délivrer ma moitié. Il m’installe sur cette horrible bande extensible en caoutchouc. De l’autre côté du canyon, un plateau verdoyant identique à celui sur lequel je me trouve. Tout d’un coup, dans un tintement de cymbales, je vois sortir de terre un rondin, spash un deuxième. Une planche de pierre surgit dessus et forme un premier palier. Rebelotte, les mêmes éléments forment le deuxième. Dans un vrombissement, jaillit une échelle en bois reliant les deux niveaux. Un nuage de fumée crache deux colonnes de roche dans un grands fracas. La tour infernale a pris forme. Les petites boules vertes éclosent, pok, pok, pok. Je les entends grogner et ricaner. C’est partis. Il pose son doigt sur moi. Me glisse. En haut, en bas. Il ajuste la courbe pointillée. Naf- Naf, en ligne de mire sur le sommet. Il sautille, me nargue. L’index se retire. Comme un missile je suis tiré dans les airs. Je fais une pirouette sur moi-même. Sous mon ventre je vois défiler le ravin. J’aperçois deux groins verdâtres au premier étage. Bim ! Pleine tête ! Ma cible explose dans une nuée verte. Sous le choc, les pilonnes dégringolent, la porcherie entière s’écroule dans un déluge d’étincelles, de gravats et de fumée multicolores. Elle entraine dans sa chute les deux autres cochons. Ils éclatent à leur tour au milieu de ce capharnaüm ! J’empoche une carte supplémentaire ! Je passe au deuxième tableau. Cymbales, rondin, planche, pilier, fumée, fracas, étoiles…Le boucan fait place à une autre construction tout de bois. Les taches vertes puantes sont cachées à l’intérieur. « Chucky ! A toi ! ». Bravo, il nous fait passer au grade de cent plumes ! Niveaux après niveaux j’accumule les points, les gem ’s, les perles, et divers trésors ! Voilà le premier boss. Un cochon accoutré d’une de toque de cuisinier ! « Terry vas-y ! Le gros est pour toi ». Il fait un carton plein. Tout s’écroule ! Plus qu’un jet. Bien calé dans le lance piaf. Je m’envole. Rate la cible. Le bloc rocheux flottant dans le vide me gêne. Je n’ai plus de vie. Si j’échoue ? Je perds ma belle. Derniers essais. Le doigt ajuste le tir. Il vise la fleur en flan de paroi. ! Projeté, je m’enfonce de plein fouet. Elle me recrache. Boom ! La dernière forteresse s’effondre ! Je récupère la clés mystère qui ouvre la cage de Mathilde…
« Bonjour Linus ! Il lève la tête de son téléphone. Elle se tient debout devant lui. Elle lance son regard sur l’écran. C’est Angry Birds ? »